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Gouvernance foncière au Sénégal : IPAR co-organise avec le MAER, la FAO et le FIDA l’atelier de lancement sur les directives volontaires

Publié le 24 juin 2014

Du 12 au 14 mars 2014, le Ministère de l’Agriculture et de l’Equipement Rural (MAER) du Sénégal, la FAO, le FIDA et IPAR ont organisé un atelier de partage des Directives Volontaires (DV) pour une gouvernance responsable des régimes fonciers applicables aux terres, aux pêches et aux forêts dans le contexte de la sécurité alimentaire nationale. Cet atelier a bénéficié de l’appui financier de la France, de l’Italie et du don du FIDA accordé à IPAR pour la dissémination des directives en Gambie, en Mauritanie, au Mali et au Sénégal.

L’objectif global de cet atelier national était d’informer les acteurs nationaux et d’initier un dialogue sur les Directives et les initiatives régionales pour l’amélioration de la gouvernance foncière au Sénégal.

La Cérémonie d’ouverture a été introduite par Mr Samba Gueye, Président du CNCR qui salue l’initiative qui pourra contribuer à faire respecter les droits coutumiers. Il a invité les initiateurs à accorder une attention particulière aux organisations paysannes. Il a manifesté la disponibilité de son organisation à appuyer ce processus et à renforcer sa collaboration avec l’Etat et les organisations du présent atelier.

Mme Mariam Sow, coordonnatrice d’Enda et représentante de la société civile a insisté sur le besoin d’un espace de dialogue entre les acteurs de la société civile et l’État. Pour elle, les Directives volontaires représentent un accord international sans précédent à condition qu’elles soient plus contraignantes et que nos États les reconnaissent comme principe s’opposant à toute forme d’accaparement des terres.

Jean-Maurice Durand, Représentant du FIDA a insisté sur la reconnaissance des droits fonciers des populations rurales qui est une condition nécessaire pour réduire la pauvreté. Les principes sont volontaires, mais leur caractère participatif leur confère une portée internationale. C’est aussi selon lui une occasion de raviver ou créer des partenariats et d’assister à une réelle amélioration de la gouvernance foncière pour le plus grand bénéfice des populations. Le rôle de la FIDA est d’assister ce processus afin d’améliorer les conditions de vie des populations rurales.

Mme Tine Ndoye, Présidente du Réseau des femmes rurales est revenue sur l’importance d’assainir le milieu du foncier pour un accès équitable des couches les plus défavorisées (femmes et jeunes).

Mr Vincent Martin, représentant de la FAO, au nom du directeur de la FAO, Da Silva, souhaité la bienvenue et remercié le gouvernement du Sénégal d’avoir accepté d’accueillir ce processus.

Il a noté qu’avec le soutien de la coopération italienne, la FAO organisera trois autres rencontres dans les deux années à venir. Cette session vise à établir un premier diagnostic participatif sur la gouvernance foncière dans un contexte mondial marqué par les changements globaux et les pressions sur les ressources naturelles. Pour lui la gouvernance repose sur des mécanismes qui permettent d’articuler les intérêts des populations et les besoins d’investissement.

Le Président de la commission développement rural de l’assemblée nationale a, quant à lui, salué la démarche inclusive et transparente, qui a associé la société civile, la recherche et les privés. Pour lui, Il faut aller au-delà des directives volontaires pour promouvoir une véritable réforme de la loi sur le domaine national qui doit s’adapter au contexte de l’Acte III de la décentralisation. Il a manifesté la disponibilité de l’Assemblée nationale d’accompagner le processus de dissémination des directives volontaires pour contribuer à une réforme inclusive.

Mr Pape Abdoulaye Seck, Ministre de l’Agriculture et de l’équipement rural dira l’importance qu’il accorde au processus relatif à la dissémination des directives volontaires dont il a l’honneur de présider la cérémonie de lancement. Pour lui, la question de la terre demeure une préoccupation majeure dans un contexte de valorisation des ressources naturelles. Elle conditionne la propension à investir car la sécurisation de l’investissement privé est un critère fondamental de décision politique.

C’est le sens de la mise sur pied par Monsieur le Président de la République, Macky Sall, d’une commission chargée de faire des propositions de réforme foncière. Cette commission va intégrer la question de l’implication des femmes et des jeunes et de leur participation dans la gouvernance foncière. Pour le gouvernement du Sénégal, les exploitations familiales ont de bonnes raisons d’exister, il convient d’améliorer leur efficacité et de les soutenir, elles ont un rôle à jouer dans l’atteinte d’une sécurité alimentaire. Le Gouvernement qui est favorable au développement de l’agrobusiness, va tout mettre en œuvre pour qu’il soit en complémentarité avec l’agriculture familiale. Il ne s’agit pas de choisir entre les deux types d’agriculture. Enfin, il a plaidé pour que l’investisseur privé négocie avec les Communautés rurales sur la base d’un cahier de charges pour un partenariat gagnant-gagnant. La réflexion peut s’appuyer sur l’exemple du PDIDAS. Il faut agir vite et bien pour accélérer la cadence du développement agricole tel que l’invite le Plan Sénégal émergent.

Présentation des objectifs de l’atelier

Le second moment fort a été la présentation des objectifs de l’atelier. A ce titre, les directives apparaissent comme une opportunité pour créer un espace de dialogue et de concertation entre les acteurs. Pour le Sénégal, au niveau gouvernemental, la commission nationale de réforme foncière existe depuis 2012. Ainsi, il faut se demander si les Directives volontaires peuvent constituer la base de la relance du débat sur la réforme foncière. Il existe une multiplication d’initiatives gouvernementales, ainsi il faut voir comment concilier l’agrobusiness et l’agriculture familiale. Il y a une volonté de tester des modèles fonciers.

Madame Aurélie Bres, de la FAO est quant à elle revenue sur « Comment utiliser les Directives ? »
La structure du document sur des directives volontaires repose sur trois blocs : les objectifs, les principes et les actions.

Préambule  : Qui peut bénéficier des directives ? Qui peut contribuer à leur mise en œuvre ? Les Directives volontaires permettent le dialogue politique, la reconnaissance des droits et l’amélioration des pratiques. Au niveau international, la sécurité alimentaire repose sur la sécurisation foncière. La sécurisation foncière peut ainsi servir aux exploitations familiales et aux entreprises agricoles.

Objectifs des directives  : Premier document international sur le foncier, qui forme un consensus sur les pratiques existantes, les directives volontaires constituent une référence pour améliorer la gouvernance foncière. Elles ont été développées en parallèle dans le cadre des lignes directrices de l’Union africaine, à travers le LPI.
Elles visent à contribuer à la sécurité alimentaire, au développement durable et à la gestion de l’environnement, en renforçant la transparence des systèmes fonciers et en protégeant les droits fonciers légitimes, à travers l’amélioration du cadre institutionnel. Les Directives volontaires considèrent tous les types de tenure foncière et sont applicables dans des contextes nationaux. Une attention particulière est accordée aux populations marginalisées ou vulnérables. Les directives n’entraînent pas d’obligations légales, mais sont en accord avec les dispositions légales existantes. Elles fixent des points de références et des principes .
(Voir présentation PowerPoint)

Dans sa présentation, Mr Jean-Maurice Durand, du FIDA, spécialiste du foncier est revenu sur l’historique de l’élaboration des directives volontaires.
Il a rappelé le processus qui a réellement débuté en 2009 : une quinzaine de réunions ont été organisées partout dans le monde. En Afrique francophone, une réunion régionale s’est tenue au mois de juin 2010 à Ouagadougou. Sur la base de ces consultations, un avant-projet a été établi. En 2011, le document a été rédigé et soumis à une consultation électronique. Les négociations ont eu lieu en trois sessions d’une semaine entre 2011et 2012. Les discussions ont été très pointues, le document a été revu phrase par phrase et approuvé par le CSA en mai 2012. (Voir la présentation PowerPoint en fichier joint)

Dr Yacouba Sanon de la Direction de l’agriculture et du développement rural de la CEDEAO a fait une présentation sur le thème : « les questions foncières dans les politiques agrosylvopastorales et halieutiques de la CEDEAO »

Dr Sanon a montré que depuis 2002 avec la naissance de l’UA, il y a eu un nouveau départ pour les politiques agricoles. La CEDEAO comptera 400 millions de consommateurs à l’horizon 2020. Ainsi, la terre est à la fois l’essence de l’existence d’un État national mais aussi un support pour les systèmes productifs et l’exploitation des ressources naturelles. Dans l’espace CEDEAO qui comprend 15 États membres, la question foncière est au cœur des préoccupations des décideurs.(Voir présentation PowerPoint)

Dr Soumana Diallo – UEMOA a fait une présentation portant sur : « Importance et rôle du foncier dans les processus d’intégration régionale et le développement rural en Afrique de l’ouest : initiatives de l’UEMOA et implications pour la bonne gouvernance foncière »

Disposant d’une population jeune (plus de 60% ont moins de 25 ans) l’objectif principal pour l’UEMOA est le renforcement de la compétitivité économique, la convergence des politiques économiques, la création d’un marché commun, la coordination des politiques sectorielles et l’harmonisation des législations.
• La Politique Agricole commune vise l’adaptation des systèmes de production et l’amélioration de l’environnement de la production et l’approfondissement de marchés communs ;
• Le Marché commun vise : l’élimination des droits de douanes et les restrictions, la circulation des marchandises, l’établissement d’un tarif extérieur commun, la liberté de circulation des personnes et des capitaux ;
• La Politique d’aménagement du territoire communautaire vise à renforcer les politiques nationales et communales et l’utilisation et la valorisation optimale de l’espace et des ressources naturelles.

Le processus est enclenché, ce qui dénote une forte volonté politique. En 2012, la Conférence des Chefs d’États et de gouvernements a instruit l’UEMOA de développer une réflexion sur les questions foncières. La demande a été renouvelée en 2013. (Voir présentation PowerPoint)

A la suite de ces différentes présentations une série de questions, commentaires et contributions a suivi. En réponses aux interpellations les exposants ont chacun en ce qui le concerne apporté des éclaircissements. Voir CR atelier

Travaux de groupe, restitution et discussion

Le troisième moment de l’atelier a débuté avec la restitution des travaux de groupes avec comme thème proposé : Quelles contributions des Directives volontaires pour la promotion d’une gouvernance foncière et la sécurité alimentaire au Sénégal (Utilisation des Directives, actions concrètes et mécanismes de concertation) ?

A cette question, les trois groupes ont fournis les propositions suivantes :
Groupe A : nécessité de définir un modèle d’affaire qui sécurise les droits fonciers des populations locales ; faire en sorte que l’agrobusiness contribue à la souveraineté alimentaire ; contractualiser à travers des cahiers de charge ; en plus d’un encadrement juridique.
En guise de solution, le groupe invite : au contrôle citoyen de la gouvernance foncière ; à la mise à disposition des outils de gestion (système d’information foncier ; à la mise en œuvre de la LOASP ; et à la prise en compte des droits coutumiers dans la réforme foncière.

Groupe B  : Les enjeux sont multiples. La volonté est réelle mais on rencontre des difficultés dans l’action ; encourager les opportunités de synergies (PDIDAS, NASAN). Pour le groupe, Il faudrait donner plus de sécurité aux paysans dans le cadre des DV ; avoir un meilleur aménagement du territoire et garantir le droit d’accès à la terre aux femmes. L’État a exprimé son désir d’aller vers une réforme depuis 1996, mais elle tarde à venir à cause de la sensibilité à la terre. Il vaut mieux conserver le régime actuel plutôt que d’aller vers une réforme malheureuse. A ce titre, le CRAFS peut être un levier pour que l’État puisse consulter les acteurs concernés.

Groupe C : Trois enjeux ont été discutés dans ce groupe : la cohérence et l’harmonisation des textes et des pratiques ; la volonté politique réelle ; le cadre fonctionnel inclusif de négociation et de dialogue prenant en considération la dimension genre.
A la suite des discussions et pour conclure, Dr Cheikh Oumar Ba dira que les Directives Volontaires sont une source d’inspiration pour chaque catégorie d’acteurs.
La cérémonie de clôture a été présidée par Madame Aminata Mbengue Ndiaye, Ministre de l’élevage mais avant Dr Daouda Diagne rapporteur, après un rappel des objectifs, résultats et perspectives, a fait une synthèse générale de l’atelier qui a été validée préalablement par l’assemblée.

Mr Cheikh Oumar Ba, Directeur exécutif de l’IPAR, après avoir remercié partenaires et participants au nom du PCA d’IPAR, reconnait que les Directives volontaires sont une source d’inspiration des différents acteurs. Pour lui le code pastoral s’inspire de plusieurs principes contenus dans les DV qui peuvent jouer un grand rôle pour la réforme foncière.

Mr Laurent Godefroy, représentant de l’ambassade de France s’est réjouie de la très forte implication de l’État Sénégalais dans l’atelier, signe de son intérêt pour la question foncière et agricole en général.

Mr Vincent Martin, représentant de la FAO a remercié les participants pour leur engagement qui a permis de faire avancer le débat sur le foncier, une question cruciale pour le développement de l’agriculture. Selon lui il n’y aura pas d’agriculture forte et durable si l’on ne considère pas avec une attention particulière la question foncière.

Mme Aminata Mbengue Ndiaye, ministre de l’élevage, a saisi l’occasion pour mesurer à sa juste valeur le travail mené par la FAO, le FIDA et l’IPAR. Elle révèle aussi la mise en place d’importants chantiers menés par son ministère en droite ligne avec les Directives volontaires. Selon elle, l’atelier va enrichir le document du Code Pastoral et constitue ainsi un levier pour améliorer la gouvernance foncière au Sénégal. Elle invite les organisateurs à proposer un tableau de bord pour le suivi des directives. Le gouvernement du Sénégal ne ménagera aucun effort pour la mise en œuvre des recommandations qui en sortiront de ces travaux, notamment dans le cadre de la réforme foncière qui figure parmi les priorités du président de République du Sénégal.