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Mariétou DIA, coordonnatrice du volet « droit des femmes » à Action Aid Sénégal, et point focal de la sécurité humaine

Publié le 1er juin 2014

A l’issue de la « table ronde sécurité alimentaire-enjeux foncier au Sénégal » organisée en marge de la journée internationale des luttes paysannes à l’occasion de la FIARA 2012, l’IPAR a tendu son micro à Madame Mariétou DIA coordinatrice coordonnatrice du volet « droit des femmes » à Action Aid Sénégal et point focal de la sécurité humaine depuis bientôt cinq ans.

A l’issue de la table ronde « sécurité alimentaire-enjeux foncier » pouvez-vous nous dire la position de Action Aid sur la sécurité alimentaire au Sénégal ?

Comme vous avez du le constater, les débats ont été très riches parce que la sécurité alimentaire couvre plusieurs points à la fois. Il a été beaucoup question de foncier et de la réforme foncière mais aussi de tout le travail que les ruraux, notamment les producteurs font dans les exploitations familiales pour nourrir le Sénégal mais en contre partie qui souffrent vraiment d’un manque d’appui.
Aujourd’hui, dans le contexte dans lequel nous évoluons, il y a une situation de crise alimentaire surtout dans le monde rural due notamment à une faible pluviométrie mais aussi à une très mauvaise campagne agricole , au retard des semences aux producteurs et à la hausse de denrées alimentaires. Ce qui fait qu’aujourd’hui la vie est chère pour tout le monde mais avec un impact considérable au niveau du monde rural.
Au niveau de Action Aid nous avons toujours travaillé sur la sécurité alimentaire qui représente pour nous une question de droit à l’alimentation, de droit humain notamment avec tout ce que cela comporte comme questions de l’accès des femmes à la terre et de leur contrôle au niveau des ressources. Aujourd’hui, quand la survie des communautés, de nos partenaires dans les villages, dans le monde rural est menacée, je pense qu’il appartient à tous les partenaires de se mobiliser et de venir en appui à ces personnes.

Quelle est la particularité des femmes par rapport à cette question ?
Comme vous devez le savoir, les femmes sont les plus nombreuses, elles représentent un poids numérique assez important et de fait dès qu’il y a un fléau, elles représentent le groupe le plus affecté. Ensuite, la femme de manière générale est toujours dans une situation de vulnérabilité juste parce qu’elle est femme mais aussi quand une femme vit dans le monde rural dépendant de l’eau, de la recherche du bois avec des petits moyens en équipements, ne jouissant pas de tous ses droits, il est a prévoir que quand il y a une crise alimentaire c’est le groupe le plus affecté. Sur le terrain, on s’est bien rendu compte de cela parce que se sont les mères qui nourrissent les enfants donc toute leur énergie est aujourd’hui concentrée à la recherche de nourriture dans une situation qui est très précaire et qui accroit leur vulnérabilité. On a eu même des cas de violence ou des femmes parce qu’elles ont réclamé un peu plus d’argent pour aller chercher de la nourriture ont été victimes de violences. On a vu aussi des cas où des femmes ont été forcées dans une prostitution en échange d’un peu de nourriture. Vous voyez donc que tout cela accroit la vulnérabilité des femmes, les femmes enceintes qui deviennent très anémiées, qui ont des déficits en fer, en vitamine A et ce qui affecte encore le bébé à naître et ensuite toute la chaîne qui abouti à la malnutrition des enfants.

Quelles sont les réponses de Action Aid pour faire face à ce phénomène d’insécurité alimentaire ?
Dans un premier temps, c’est-à-dire dans notre travail de tout le temps, Action Aid vise à renforcer le pouvoir des pauvres et des ruraux par l’organisation et la mobilisation des producteurs en leur donnant les capacités techniques et en les appuyant à s’organiser parce que Action Aid ne fera pas le combat à la place des producteurs. On renforce leur capacité pour qu’ils aient les outils pour revendiquer ce qui leur revient de droit.
Aujourd’hui, aussi bien les producteurs hommes que les femmes nous n’avons de cesse de travailler à leur donner la connaissance, à faire en sorte qu’ils aient accès à l’information, à les mobiliser en réseaux. Certains parmi eux sont allés jusqu’au Brésil et beaucoup ont été appuyé par Action Aid pour voir aussi les autres expériences qu’ils peuvent partagées.
Avec les femmes, nous avons mené depuis 2007 une campagne sur l’accès des femmes à la terre, la lutte contre les intermédiaires. A ces différentes occasions nous avons fait beaucoup de plaidoyer mais aujourd’hui face à cette crise, la première réponse urgente a été d’assister ces populations en nourriture. Nous sommes dans le processus, nous venons de terminer toute la zone Est, de Tambacounda à Kédougou, et la semaine prochaine nous commençons la zone Centre à Fatick où la réponse immédiate est d’assurer vraiment une sécurité alimentaire au moins les trois mois en attendant de voir ce que donnera l’hivernage.
Dans le moyen et long terme nous comptons faire en sorte que dans les villages, ils y aient des magasins céréaliers, des banques de semences et de céréales pour appuyer les producteurs et les ruraux à développer des capacités de sécurisation mais aussi d’anticiper sur les effets du changement climatique qui de toute façon sont irréversibles, ça va aller de mal en pire et donc il faut qu’on puisse les préparer pour faire face.
C’est ce que nous appelons les mesures d’atténuation que les populations doivent prendre en charge pour atténuer les effets du changement climatique sur leur vie. Dans le long terme évidemment c’est de les aider, là ou il n’y a pas de forage, essayer de faire un lobbying. Nous construisons aussi des citernes de collecte d’eau de pluie notamment à Kédougou là ou il n’y a pas d’eau pour réduire la corvée des femmes surtout en période de sécheresse.