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RESILIENCE FACE A L’IMPACT DU CHANGEMENT CLIMATIQUE L’INFORMATION CLIMATIQUE AU SERVICE DE L’AGRICULTURE

Publié le 9 octobre 2015

Avec une pratique culturale basée essentiellement sur la pluie, le Sénégal est confronté à un obstacle majeursur la durabilité de son agriculture, face à la variabilité des précipitations. Cette forte dépendance du pays vis-à-vis de l’agriculture pluviale le rend très vulnérable au changement climatique. Toutefois, l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie du Sénégal (Anacim), après une enquête au Sahel, a montré qu’une bonne prévisibilité des précipitations peut permettre d’établir un système d’alerte pour faire face aux aléas climatiques. C’est fort de ce constat que l’Anacim, en collaboration avec le programme de recherche en Changement climatique, agriculture et sécurité alimentaire (Ccafs, sigle en anglais) et certains partenaires, a lancé un projet pour améliorer la transmission de l’information climatique et les conseils agricoles aux agriculteurs sénégalais. Une visite des champs test de la météo, dans le département de Kaffrine, plus précisément dans les villages de Gnibi, Sikilo et DagaBirame, dans la région de Kaffrine, a permis de constater de visu l’impact des services d’information météorologique dans cette zone et l’engouement suscité par ces champs test météo auprès des producteurs.

VISITE DES CHAMPS TEST DE L’ANACIM ET DU CCAFS A KAFFRINE : Entre espoir des populations et périple fastidieux

Dans le but de mieux outiller les journalistes sur le concept de « village intelligent » face au climat et l’impact des services d’information sur le climat au niveau local, régional et mondial, le CGIAR, à travers son programme de recherche en Changement climatique, agriculture et sécurité alimentaire (Ccafs, sigle en anglais) a organisé, en collaboration avec l’Anacim, une visite média à Kaffrine, du 28 au 30 septembre. Un périple long et quelque peu fastidieux par endroit, qui a permis de constater de visu la place que réservent les producteurs à l’information météo pour l’augmentation de leurs rendements agricoles, dans les localités abritant les champs test dudit programme de recherche.

14 heures ! Départ devant un hôtel de la place à Dakar où la délégation s’était donnée rendez-vous, le lundi 28 septembre à dernier. Cap sur le Ndoucoumane via le Saloum pour une visite média de la délégation, composée de journalistes nationaux et étrangers (français, camerounais, ghanéen), accompagnés des experts et techniciens de l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (Anacim), sans oublier ceux de l’Institut sénégalais de recherche agricole (Isra) et des représentants du programme Ccafs.
Le long périple (vers Kaolack situé à 192 km) se termine vers 18h dans un hôtel kaolackois. Le lendemain, mardi 29 septembre, à 8h plus précisément, la délégation embarque pour Kaffrine, distant d’environ 40 km de Kaolack.

BEAUX PAYSAGES, ABONDANTES PRAIRIES

Tout au long du trajet, un paysage beau, un tapis herbacé, des prairies par endroit marécageuses et des champs de mil et d’arachide à perte de vue, s’offrent aux visiteurs. Mieux, la quiétude du bétail, en train de paitre tranquillement, montre l’abondance de la nourriture en cette période hivernale. Il a fallu presqu’une heure trente minutes de route pour rejoindre le premier village à visiter, à savoir Sikilo, éloigné du département de Kaffrine de 6 km.

Le hameau, composé de Wolofs, de Bambaras, Sérères, et de Peulhs, majoritairement agriculteurs, compte 175 âmes. Là-bas, un comité d’accueil, composé de femmes, de vieux et de jeunes, attendait les visiteurs au bord de la route. Après les « salamalecs » d’usage, le groupe s’engage dans les broussailles à la visite du champ test de la météo, attribué à El Hadji AlimouDjaby, grand producteur agricole.

L’INFO METEO PRISEE A SIKILO

Ce chef de village de Sikilo fait visiter d’abord ses hôtes son champ test de mil de 2 ha, divisé en 4 parcelles de 0,50 ha. Selon M. Djaby, les 2 premiers champs témoins sont de la météo, dont l’un est cultivé avec engrais, l’autre sans engrais. A l’en croire, au niveau de ces parcelles, ce ne sont que les recommandations de l’Anacim qui sont appliquées. Pour les deux autres champs témoins, dont l’un avec épandage d’engrais et l’autre sans, l’agriculteur a le loisir d’y pratiquer la culture selon ses propres connaissances paysannes. Une nette différence, à savoir les couleurs des feuillages des différentes plantes dans les parcelles, tout comme la maturité du mil, sans oublier la longueur et la contenance des tiges en graines, se perçoit sans difficultés.

Pas de temps pour les journalistes de poser toutes leurs questions. Robert Zougmoré, coordonnateur de la Ccafs Afrique de l’Ouest, et Ousmane Ndiaye, docteur à l’Anacim, sont là pour rappeler qu’il y a du chemin à faire pour cette journée. Direction, le champ test d’arachide de M. Djaby. Pour y accéder, il faut se frayer un chemin dans l’herbe, qui atteint les genoux. Cependant, le gazouillement des oiseaux, encourage le visiteur à vouloir percer le mystère qui se cache derrière les petits buissons. Enfin, un étendu champs d’arachide s’offre aux étrangers, venus perturber la quiétude des insectes et autres petites bestioles, qui se sauvent après chaque pas posé sur l’herbe. Ici aussi, même dispositif, à savoir 2ha, divisés en 4 parcelles et les mêmes recommandations. A en croire M. Djaby, l’arachide du champ test météo, visiblement mieux traité, est déjà prêt pour la récolte. Ce qui n’est pas le cas pour l’autre champ paysan, où l’arachide est encore en phase de gousse.

Cap sur le champ test de Mariama Keita, à pieds, dans le même village. Mêmes configurations. Mêmes consignes dans les deux champs test de la météo. Enfin, mêmes constats. La nette différence des cultures sautent aux yeux. Une femme, mariée à un marabout l’année dernière, est mère de deux enfants. Son dynamisme et son envie de partager les informations reçues des services météorologiques avec la population de son village, sont les raisons de son choix comme relais, selon les organisateurs. Pour Mariama Keita, les informations météo leur permettent d’avoir aussi de bons rendements et de pouvoir vendre une partie des récoltes pour certains besoins. Pour preuve, elle indexe sa maison nouvellement construite, grâce aux produits de sa culture. 

LE VILLAGE CLIMATO-INTELLIGENT DE DAGA BIRAME

Revoilà encore Robert avec ses appels pour inviter les gens à presser le pas. Embarquement dans le minibus et direction, le village de DagaBirame, distant de Kaffrine de 17km. Cette fois-ci, les visiteurs ont moins de chances qu’à Sikilo. Les champs se trouvent à l’intérieur des terres. Impossible d’y accéder en voiture, car le chauffeur refuse de prendre des risques. Le reste du trajet se fait donc à pieds pour rejoindre la Parcelle communautaire de domestication de fruitiers forestiers de la plateforme d’innovation.

Dr DiaminatouSanogo, directrice au Centre national de recherches forestières de l’Isra, non moins coordonnatrice du Bras-Par du Ccafs au Sénégal, explique aux populations, les raisons de cette visite. Ces dernières manifestent leur satisfecit pour le projet.
Dans le village, les populations, avec l’assistance de l’Isra, l’Anacim, la Ccafs et autres partenaires, développent et expérimentent la pratique/technologies climato-intelligentes mise sur pied par le programme Ccafs. Les conseils et recommandations météo y sont appliqués à la lettre. La bonne santé des fruitiers plantés dans la parcelle, tout comme celle de l’arachide généreusement prometteur, prouvent que les informations de l’Anacim sont passées.

Enfin, les visiteurs peuvent prendre la direction de Gnibi, loin de Kaffrine de 45 km, pour rendre visite à Mme Météo, de son vrai nom, Ami Ndiaye.
Elle reçoit ses hôtes avec du thé, avec une très grande joie de retrouver ses formateurs de l’Anacim, tout comme ceux du Ccafs. Cette jeune maman de 34 ans, mère de 4 « bouts de bois de Dieu », est une grande productrice agricole, qui est dans le projet depuis ses débuts, en 2011. Elle dirige ses hôtes jusque dans ses terres où le même dispositif des champs test météo, tout comme les mêmes bonnes pratiques sont appliqués à la lettre. Enfin, les visiteurs peuvent se séparer de leurs hôtes vers 17h pour prendre la direction de Kaolack, pour moins de 2h de route. Un autre périple attend le groupe, le lendemain.

CHAMPS TEST DE LA METEO A KAFFRINE : L’amorce de la prise de conscience

Partout où les champs test de l’Agence nationale de l’aviation civile et de la météorologie (Anacim), en collaboration avec le programme de recherche en Changement climatique, agriculture et sécurité alimentaire (Ccafs, sigle en anglais), sont mis en place, les populations des localités réclament plus d’informations climatiques pour augmenter leurs rendements agricoles. La remarque a été faite par les relais de l’Anacim, chargés d’expérimenter le projet dans leur localité.

Dans le but d’aider les agriculteurs à prendre des décisions éclairées sur leur culture et leur récolte, l’Anacim, en collaboration avec le Ccafs, a développé un projet pilote pour fournir des informations sur des prévisions climatiques aux producteurs et paysans de Kaffrine sous forme de bulletin, de Sms, et d’émissions. Cela, après avoir réalisé que les méthodes de prévisions traditionnelles des agriculteurs ne suffisaient plus pour assurer une production soutenue, face aux risques climatiques. Pour ce faire, des sites d’essais, dans lesquels les prévisions météorologiques et conseils agricoles sont strictement appliqués, ont été mis en place, pour prouver aux agriculteurs l’importance de l’Information climatique (Ic).

De l’avis d’El Hadji AlimouDjaby, grand producteur agricole tenant un champ test météo à Sikilo, situé à 6 km de Kaffrine, « au début, on croyait ici que tout reposait sur la volonté divine et on ne prenait pas au sérieux les informations de la météo ». Actuellement, poursuit-t-il, « avec les champs test de la météo, il y a vraiment une augmentation des rendements ». A l’en croire, l’année dernière (la campagne agricole 2014), il a eu 55 bottes de mil dans un demi hectare de la météo, contre 49 dans l’autre paysanne. Selon ce chef de village, la demande en information climatique par les agriculteurs est de plus en plus forte.

Racontant une anecdote, il a informé qu’il y a un étranger qui est venu cultiver un champ d’arachide tout près de ses terres, sans recourir aux informations climatiques. Ce dernier a été stupéfait, selon ses dires, des résultats de ses cultures et s’est par la suite rapproché de lui pour savoir comment il a procédé pour avoir de belles cultures. Toutefois, il fait savoir, par ailleurs, que pour appliquer strictement les recommandations de la météo, il faut beaucoup de moyens, quand on est en possession de plusieurs hectares, comme son cas. 
Tout comme M. Djaby, Amy Ndiaye, dite Mme Météo, détentrice d’un champ test météo au village de Gnibi, se dit satisfaite des résultats du projet. Selon cette jeune femme, « au début, les gens ne croyaient pas trop à la météo et disaient que seul le Bon Dieu était à mesure de connaitre le temps qu’il fera après ». « Mais, avec les résultats probants de mes cultures, presque tout le monde se rapproche de moi pour avoir les informations utiles pour l’agriculture », s’est-elle réjouie.

Qu’appelle-t-on champ test de la météo ?

Cheikh Diouf, au service départemental du développement rural, chargé du suivi de l’utilisation de l’information climatique par les agriculteurs pour mieux sécuriser la production, explique que la méthodologie c’est de travailler sur 4 parcelles contigües de 0,50 ha chacune. Selon lui, les deux premières parcelles de la météo, l’une avec engrais et l’autre sans engrais, utilisent strictement l’information climatique. Tandis que, poursuit-t-il, les deux autres champs paysans, sont cultivés selon les connaissances paysannes.

C’est sur la base des prévisions saisonnières données par l’Anacim, avec les deux paramètres suivants : la date de début (tardive) et la quantité d’eau à enregistrer (normale à déficitaire), que les champs météo ont été construits. A l’en croire, « dans la mesure où on a une prévision d’une installation tardive de l’hivernage, on a utilisé une variété à cycle court, le Souna 3 ». En fonction du type d’hivernage, « on a semé dès la première pluie utile, qui s’est annoncée ici (Kaffrine) pendant la première dizaine du mois de juillet », explique-t-il.
Toutefois, il a fait savoir que les agriculteurs sont accompagnés tout au long de la saison en leur fournissant les prévisions temps par dix jours, ou bien toutes les 24h, ou encore de façon immédiate. « Par exemple, lorsqu’on reçoit une prévision qui fait état de journées successives de précipitations, alors on ne fertilise pas les sols pour éviter les pertes par profondeur ou par drainage des engrais », renseigne-t-il.

FACE AUX CHANGEMENTS CLIMATIQUES ET SES CONSEQUENCES : Les populations de Daga Birame prennent les devants

Situé à 17 km de la ville de Kaffrine, les populations du village de Daga Birame, développent et expérimentent depuis deux ans les pratiques/technologies climato-intelligentes initiées par le programme Ccafs en collaboration avec ses partenaires. De l’avis de Dr Diaminatou Sanogo, directrice au Centre national de recherches forestières de l’Isra et coordonnatrice du projet Bras-Par du Ccafs au Sénégal, cette prise de conscience collective de la population résulte d’un diagnostic participatif sensible aux changements climatiques et d’une visite d’un site analogue à Dahra, Linguère.

Depuis deux ans, les populations du village de DagaBirame, situé à 17 km de Kaffrine, développent et expérimentent des pratiques/technologies climato-intelligentes initiés par le programme Ccafs en collaboration avec l’Isra, l’Anacim, des Ong de développement, l’Agence nationale de conseil agricole et rural (Ancar), le service des Eaux et forets, ainsi que d’autres partenaires, telle que la commune, la sous-préfecture, etc. Dans ce village, les populations, avec l’aide d’une plateforme d’innovation regroupant tous les partenaires précités, ont mis sur pied une parcelle de domestication des fruitiers forestiers, de 2 ha. 

Selon les explications de MohamadouDiop, assistant de recherche à l’Isra, « cela consiste à élever des fruitiers forestiers (à domestiquer) en raccourcissant leur cycle de production et en les mettant dans les concessions ». Dans la parcelle sont plantés des baobabs greffés, importés du Mali et une variété locale. Il y a aussi le tamarin avec 4 variétés : une sucrée, une importée du Niger, un agro-fruit pour ceux qui veulent faire du jus, et la variété locale. S’y trouvent aussi différentes variétés de jujubiers. Mieux, cette parcelle sert également d’espace maraicher pour les femmes. 

En outre, les populations ont décidé de pratiquer une mise en défense pour atténuer les effets des changements climatiques. De l’avis de M. Diop, « une mise en défense est un espace communautaire inter-villageois que les populations décident de manière consensuelle de préserver ». Dans cet espace inter-villageois d’une superficie de 128 ha à DagaBirame et 240 ha à Ngouye, la coupe de bois, tout comme la cueillette des fruits qui ne sont pas en maturité sont interdites. Un comité de surveillance, reconnu par le sous-préfet et toutes les autorités de la localité, a été mis en place. 

Dans ce paquet technologique, pour l’adaptation aux changements climatiques, il y a, en plus de la fertilisation des sols par la micro-dose d’engrais organique, la régénération naturelle assistée (Rna). Toujours d’après les éclairages de M. Diop, « cela veut dire qu’au moment du défrichage du champ, l’agriculteur ne coupe pas tout, mais laisse au niveau de chaque souche une à deux tiges, qui vont pousser. Cela permet au producteur d’avoir du bois et d’avoir aussi des arbres dans son champ ». Dans la même veine, les villageois, avec l’aide de certaines Ong, développent l’aviculture biologique avec l’élevage de poulets. Mieux, les autochtones de ces deux villages bénéficient de séances de renforcement de capacité dans l’usage des informations climatiques qui sont utilisées dans la parcelle de domestication, le champ test et par les producteurs eux-mêmes dans leurs champs.

D’où vient cette prise de conscience collective des populations sur les enjeux des changements climatiques ?

De l’avis du Dr Diaminatou Sanogo, un diagnostic participatif sensible aux changements climatiques a été fait avec les populations. Ce qui a permis de voir, selon elle, « quels sont les aléas climatiques qui affectent ces producteurs, quelles sont les stratégies d’adaptation qu’ils ont mis en place et aussi est-ce qu’ils ont des stratégies qui sont viables et durables pour eux ? » Par rapport à ces aléas, une vision sur 30 ans a été établie pour voir d’ici ces trois décennies prochaines à quel type de village analogue ressemblerait DagaBirame, explique-t-elle.
Ainsi donc, « nous avons trouvé 4 à 6 sites analogues. Il y a un site en Colombie, au Pérou, au Sri-Lanka, au Ghana, et un au Sénégal. Par rapport aux moyens, il était plus facile de les amener dans le site analogue du Sénégal, à Dahra, à Linguère ».

Poursuivant, Mme Sanogo a fait savoir que lors de cette visite, les populations ont constaté qu’en quittant leur village, ils n’avaient pas vu d’arbres jusqu’à Dahra. « C’est ainsi qu’ils se sont dits que s’ils continuent leurs anciennes méthodes, ce n’est pas dans 30 ans qu’ils seront comme Dahra, mais d’ici 15 ans », confie-t-elle. « C’est dans ce cadre qu’ils ont décidé de mettre en place une mise en défense pour atténuer les effets des changements climatiques », informe-t-elle. Mieux, selon elle, ils ont constaté que les femmes de Dahra exploitaient les fruits forestiers alors qu’ils n’en ont pas assez dans leur localité. Pour ce faire, les femmes ont décidé de valoriser ces produits et se sont regroupées en Gie, appelé GieSoukali de la plateforme de GuouyeDagaBirame, tout en protégeant tous les baobabs, selon elle.

SITUATION FAVORABLE A LA PLUIE JUSQU’AU 15 OCTOBRE : Le Gtp de Niakhar recommande de ne pas récolter

Dans sa prévision météo de ces dix prochains jours, l’Anacim montre que la saison des pluies n’est pas encore terminée. A en croire les services météorologiques, la situation reste favorable jusqu’au 15 octobre prochain. Ainsi donc, fort de cette prévision, le Groupe de travail pluridisciplinaire (Gtp) de Niakhar (Fatick), réuni le mercredi 30 septembre dernier au niveau de l’Institut français de recherche pour le développement (Ird) de ladite localité, a conseillé aux agriculteurs de patienter. Pour MaodoSamb, chef de service régional de la station météorologique de Fatick, non moins coordonnateur du Gtp de Niakhar, « il est déconseillé aux agriculteurs de procéder à la récolte avant le 15 octobre prochain ». Pour cause, M. Samb estime qu’il y a de forts risques d’enregistrer des pertes de récoltes en pareilles situations. A l’en croire, « le risque est qu’avec la pluie, il peut y avoir des moisissures et la perte de foin, à savoir les tiges de mil, tout comme la paille d’arachide ».

Cependant, les agriculteurs présents à cette réunion du Gtp, ont émis un certain nombre de contraintes, qui les obligent à procéder à la récolte. Selon eux, il y a d’abord le manque de main d’œuvre dès que les potaches rejoindront les salles de classe. Ensuite, ils estiment qu’il y a vraiment un besoin pressant de liquidité pour être à mesure de venir à bout de certaines charges scolaires (fournitures). Autre inquiétude des agriculteurs, le besoin de nourritures. Ainsi, donc pour eux, il est inimaginable pour certains d’entre eux de patienter encore plus. Face à ces nombreuses contraintes, le Gtp qui se veut accompagnateur et non coercitif, selon M. Samb, demande à tous ceux qui sont dans de pareilles situations, de prendre les mesures nécessaires pour minimiser les pertes de récolte. 

C’EST QUOI LE GROUPE DE TRAVAIL PLURIDISCIPLINAIRE ?

Selon Ousmane Ndiaye, chef du département recherches et développement à l’Anacim, « c’est un cadre où tous les partenaires se regroupent avec les leaders paysans, et les décideurs locaux pour dire, par rapport aux informations météo, quelles sont les dispositions à prendre ». Ses membres sont, entre autres, les structures déconcentrées qui œuvrent dans le domaine du développement rural, en particulier l’agriculture, l’élevage, les eaux et forets, la météo, le développement local, le conseil agricole et rural, les agriculteurs et éleveurs, tout comme les services de la météo, etc. A l’en croire, le Gtp est institué par le gouverneur de chaque localité et se réunit chaque 10 jours. Il a pour mission principale de mettre à la disposition de ses différents partenaires l’information climatique, de l’analyser et de formuler des recommandations. A la suite de ces échanges, explique-t-il, un bulletin d’information est envoyé à la tutelle, aux producteurs par Sms ou à travers les radios communautaires, avec qui l’Anacim a noué un partenariat depuis l’année dernière.

PORTRAIT D’AMY NDIAYE, UNE JEUNE PRODUCTRICE AGRICOLE A GNIBI : Le succès au bout de l’effort

Qui disait que l’agriculture est strictement une affaire d’hommes, et que les femmes pouvaient se contenter de petits espaces pour la culture maraichère ? En tout cas, de nos jours au Sénégal, cette assertion est à mettre aux oubliettes. La preuve, par Amy Ndiaye, grande productrice agricole au village de Gnibi, situé à 45 km du département de Kaffrine. Jeune maman de 34 ans, elle est mariée et mère de 4 enfants. Comme par hasard, le destin lui a permis de faire une parité naturelle en ayant 2 garçons et 2 filles.

Pour décrire Amy Ndiaye, il suffit simplement de noter que c’est le dynamisme et l’énergie personnifiés. Amy Ndiaye fait partie des premières à bénéficier de l’encadrement de l’Anacim dans la zone de Kaffrine depuis le début (en 2011), pour expérimenter les champs test météo. Mieux, elle a participé à la mission d’échange entre le Sénégal et la Colombie en juin 2014, et fait partie des relais de la météo au niveau du département de Kaffrine. C’est d’ailleurs son amour pour l’agriculture, sa disponibilité à partager les informations météo autour d’elle, tout comme sa maitrise des informations climatiques, qui lui ont valu le sobriquet de ‘’Mme Météo’’, qui fait office de prénom dans tout le secteur.

Constatant une nette différence de rendements entre les champs test de la météo et ceux cultivés avec les connaissances paysannes, elle a décidé d’utiliser les informations de prévision venant de la météo dans ses activités agricoles. A l’en croire, « tout au début, avant de disposer des informations météo, je ne pouvais emblaver que 1,5 ha. Mais, maintenant avec les informations météo, j’ai osé emblaver 38 ha ». Pour être en possession d’autant de surfaces, Mme Ndiaye a bénéficié des largesses de son père, Sérigne Sidy Khalife de Sérigne Abdou Lakhate.

Comment mettre en valeur autant de champs pour une fille ?

Pour y arriver, « j’ai 7 employés permanents, sans compter moi-même. Je loue les services des gens qui ont des chevaux pour cultiver », informe-t-elle. Dans ses champs, elle cultive du mil, de l’arachide, du sésame, le haricot et de la pastèque. Mieux, « je cultive de la pré-base d’arachide, à savoir de l’arachide de bonne qualité pour les semences », dit-elle. Cependant, c’est tout un tabou de parler de ses revenus, même si elle affirme ne pas se plaindre et rendre grâce à Dieu.

Pour y arriver, Amy Ndiaye a dû faire du chemin et avaler beaucoup de couleuvres dans son village. A l’en croire, « au début, les gens ne croyaient pas trop à la météo et disaient que seul le Bon Dieu était à mesure de connaitre le temps qu’il fera demain ». Pis, elle confie que « lorsque je me rendais à Kaffrine ou à Dakar pour des séminaires et des formations, au village on racontait du n’importe quoi sur ma personne. On disait que j’étais une fille de mœurs légères ». Un discours qui a radicalement changé, selon elle, grâce aux résultats probants de ses cultures avec l’aide de l’information climatique. D’ailleurs, se glorifie-t-elle, « presque tout le monde se rapproche de moi pour avoir les informations utiles pour l’agriculture ». Un cas de réussite qui a impulsé un certain engouement des populations à l’information climatique au service de l’agriculture.

Source : http://www.sudonline.sn/l-information-climatique-au-service-de-l-agriculture_a_26614.html