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Jean-Claude MARUT, chercheur français : « Le foncier est à l’origine de la contestation en Casamance »

Publié le 2 juin 2014

Le conflit armé en Casamance était au menu d’une conférence hier au Centre d’études des sciences et techniques de l’information (Cesti) de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar. Le conférencier, Jean-Claude Marut, chercheur au Cnrs, a affirmé que le foncier est à l’origine de la violence armée dans région Sud du Sénégal.

Le thème du foncier occupe une place centrale dans les discussions entre l’Etat et les factions rebelles du Mouvement des forces démocratique de la Casamance. C’est du moins l’avis de Jean-Claude Marut, spécialiste en géopolitique et chercheur au Cnrs, auteur de nombreuses publications scientifiques sur la crise. Hier, en conférence au Cesti, M. Marut a affirmé que cet élément est revenu dans ses investigations sur le sujet qui demeure très complexe dans sa forme comme sur le fond.
Mais le chercheur français retient quatre éléments fondamentaux à savoir le foncier, la tradition, la répression et les risques existants. Selon lui, le foncier est à l’origine de la violence armée, évoquant ainsi la confiscation des terres par l’administration locale à Ziguinchor et par l’Etat en Casamance. A en croire Jean-Claude Marut, les points de vue des populations n’ont pas été pris en compte par les pouvoirs politiques qui ont choisi les méthodes bureaucratiques.

Le conférencier soutient que partant de cette situation, les protestations provenaient des populations qui voyaient leurs terres spoliées par des « étrangers », voire des non autochtones, notamment dans la commune de Ziguinchor. Il brosse un peu la genèse en faisant état de l’ignorance, par les pouvoirs publics, de la tradition censée leur offrir une tribune pour régler les protestations. Mais, note-t-il, la question a été mal négociée par l’Etat à l’époque du régime socialiste.
« On oublie trop souvent que cette tradition est porteuse de noyau politique et de la régulation du vivre ensemble », fait-il remarquer. Seulement, selon Jean-Claude Marut, à la fin des années 70, avec la crise au Sénégal, la confiscation des terres par les pouvoirs politiques posait problème aux populations qui protestaient en parlant d’accaparement de leurs richesses.

« Cette confiscation était faite sans concertation, ni compensation des populations », indique-t-il. Le chercheur du Cnrs parle ainsi, à propos de la distribution des terres confisquées, de clientélisme politique. Même s’il est d’accord sur le fait d’attribuer celles-ci à ceux qui travaillent. Mais, « c’est la manière brutale de sa détention en conformité avec la loi du domaine qui est contestée », dit-il.

Jean-Claude Marut a aussi évoqué dans ce contexte le développement de la région très enclavée, malgré son taux d’alphabétisation plus élevé que celui de Dakar. Le conférencier souligne le risque de nouveaux conflits qui peuvent resurgir et qui ne sont pas relatifs au foncier. Il cite, entre autres, le retour des déplacés qui sont au nombre 60.000 en 2006, selon le recensement, l’exploitation minière en cours du zircon et la déforestation dramatique que subissent les espaces verts casamançais.

Cheikh M. COLY

Source : http://www.lesoleil.sn/index.php?option=com_content&view=article&id=36469