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Trois questions à Cheikh Oumar BA de l’IPAR

Publié le 4 juin 2014

 Interview de Cheikh Oumar Ba, Directeur exécutif de IPAR paru dans le journal Sud Quotidien du 30 septembre 2011. M. Ba s’exprime en marge de l’atelier organisé par le CRDI sur la mobilisation des ressources.

 

« Fournir des matières premières pour les industries à travers l’agriculture n’est pas valorisé au Sénégal »

260 milles jeunes arrivent chaque année dans le marché du travail au Sénégal. Les secteurs formel et informel n’employant que, respectivement 10% et 20% de la population active, l’agriculture est un secteur important pour l’absorption de ces demandeurs d’emploi en ce sens qu’elle emploie plus de 70% des actifs. C’est la conviction de Cheikh Ouma Ba directeur exécutif de l’Initiative agricole et rurale (Ipar), une des institutions de recherche ayant bénéficié d’un financement de 400 mille dollars canadien (environ 160 million F Cfa) pour deux ans renouvelable dans le cadre de l’Initiative Think Tank lancée par le Crdi.

Vous envisagez d’auditionner les candidats à la présidentielle de 2012 sur leur programmes dans les domaines agricole et rural. Quel procédé allez-vous adopter pour cela ?

Nous souhaitons animer un débat intitulé « Audition des candidats à la présidentielle sur l’agriculture et le monde rural ». Comme avons créé un espace de dialogue entre les différends acteurs, nous nous sommes dit pourquoi ne pas profiter de l’élection présidentielle à venir, pour créer un débat avec les politiques qui veulent diriger le pays dans les domaines agricole et rural.

Et avec l’appui du Crdi, nous avons des ressources pour animer ce débat contradictoire avec les candidats dans les domaines agricole et rural. Nous avons nos recherches pour animer ce débat, nous apportons les résultats de nos recherches pour l’argumenter.

Maintenant, l’application des résultats de ces recherches par les politiques n’est pas de notre ressort. Pour nous il ya la dimension argumentaire, c’est-à-dire la recherche et celle sociale, qui n’est pas notre rôle, qui vont de pair. Notre rôle c’est de mettre à la disposition des acteurs des informations. Et sur la base de ces informations le citoyen pourra interpeller les pouvoirs publics en connaissance de cause.

La voie de la rue n’est pas la mieux indiquée. Ce qui nous importe, c’est que les populations comprennent les enjeux qu’il y a aujourd’hui à investir dans l’agriculture. Du moment que cela est fait, comment créer des rapports de force qui soient favorables aux acteurs. Si on ne l’applique pas, nous on aura fait notre rôle. L’essentiel c’est que les recherches soient des recherches de qualité, maintenant il est bien entendu que toute les recherches de qualité ne sont appliquées.

L’agriculture qui emploi 70% de la population active est un secteur important pour l’absorption des 260 mille jeunes qui grossissent chaque année le marché du travail. Mais pour cela, ne faudrait-il des investissements au préalable ?

L’agriculteur n’est pas le seul secteur qui permettrait de résorber le flux de jeunes qui arrivent dans le marché du travail chaque année. Mais c’est un secteur important en ce sens qu’elle emploie plus de 70% de la population active, et les gens oublient souvent cela. Si on regarde aujourd’hui au Sénégal, le secteur formel emploi à peine 10%, le secteur informel les 20% de la population active. Vue ce résultat on se rend compte que le secteur agricole pourrait aider à absorber ce nombre de jeunes qui arrivent dans le marche de l’emploi. Aussi, quand on fait ce genre d’études, on voit que, compte de l’évolution du monde, l’Afrique est le seul continent à n’avoir pas terminé sa transition démographique.

Donc le nombre de jeunes demandeurs d’emplois va augmenter d’ici 2050, par exemple dans les 15 prochaines années, les nouveaux demandeurs d’emplois seraient dans l’ordre 5 à 6 millions de jeunes. Comment faire pour absorber cette pléthore de jeunes ?

C’est une force et un avantage à condition qu’on investisse massivement dans le secteur agricole, qu’on construise des routes et électrifie les zones rurales et donne la possibilité aux jeunes des villes de choisir dans quel secteur ils veulent s’investir. Pour cela, le rôle de l’Eta est important, quand on sait que dans les années 80 lors des politiques d’ajustement structurelles, la Banque mondiale et le Fmi avaient interdits aux pouvoir publics de se mettre dans la production, d’accompagner ou de subventionner l’agriculture. Mais aujourd’hui avec la crise financière, on voit partout dans le monde que les Etats sont en train d’appuyer les institutions bancaires, d’investir dans l’agriculture et d’autres institutions.

Vous dites que des cinq fonctions de l’agriculture, le Sénégal n’a pas pu valoriser consistant à fournir des matières premières, pourquoi ?

La première fonction de l’agriculture c’est de nourrir la population. On produit d’abord pour se nourrir. La deuxième consiste à apporter des devises pour l’Etat quand il exporte la production. Par exemple quand on exporte de l’arachide, il y a des devises qui entrent au Sénégal. Ce qui fait que l’agriculture joue un rôle important pour tout Etat. La troisième c’est la création et la gestion de ressources naturelles. C’est comment l’agriculture contribue à bien gérer l’environnement. L’avant dernière fonction que nous voyons c’est la création de l’emploi. L’agriculture crée de l’emploi. En Afrique de l’Ouest, de façon générale, près de 70% de la population travaillent dans l’agriculture. Et en fin la fonction qui, malheureusement n’est pas valorisée ici au Sénégal, c’est fournir des matières premières pour les industries. Mais, comme je le disais tout à l’heure, l’Afrique est le seul continent à avoir connu une urbanisation sans industrialisation. Dans tous les continents avancés, l’urbanisation est accompagnée d’une industrialisation. Les gens vont en ville parce qu’il y a du travail ou parce qu’on a besoin de main d’œuvre. Ici, malheureusement, avec les périodes d’ajustements structurels, on n’a pas eu le temps de développer nos industries ou alors elles n’ont pas pu prospérer

Propos recueillis par I. Diallo