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Analyse des possibilités de mise en œuvre de la gestion participative des parcours (PRM) et de l’assurance bétail indicielle (IBLI) au Sénégal comme contribution à la Grande Muraille Verte (GMV)

Publié le 30 juin 2022

Au Sénégal, malgré les efforts menés pour améliorer la contribution de l’élevage pastoral à l’approvisionnement des centres urbains en produits animaux et forestiers, les contraintes demeurent importantes notamment dans le contexte de changement climatique.

  • C’est fort de ce constat que l’IPAR et l’ILRI, dans le cadre d’un partenariat, ont contribué pour renforcer la résilience des systèmes pastoraux par l’introduction d’un modèle de gestion participative des parcours et un modèle d’assurance dite indicielle.

L’examen des programmes et projets contribuant à la mise en œuvre de la GMV a abouti au constat suivant :

  • Au total, dix projets/programmes ont contribué à la mise en œuvre de la GMV. 8 sont achevés et 2 sont en perspective. Parmi les défis, on peut retenir : (i) l’accès à des milieux hostiles ; (ii) l’implication des populations et des collectivités locales. Concernant les goulots d’étranglement, il est noté : (i) l’enclavement des sites ; (ii) les difficultés d’accès à l’eau qui ralentit notamment les activités des femmes ;
  • Pour les activités de reboisement, les espèces suivantes sont choisies : Acacia. senegal, raddiana, nilotica, tortilis, Balanites aegyptiaca et Ziziphus mauritiana. Le choix des sites de reboisement est fait à la suite de concertation avec les autorités communales ; sites sur le tracé (fait en 2007). Une étude de base est aussi faite pour déterminer les espaces à aménager. Au départ, il était prévu une approche progressive mais le déficit pluviométrique et le surpâturage intense dans le Syer et le Mbar Toubab ont contraint à la proposition d’aller dans le Bakel plus favorable du point de vue environnement ;
  • Les plants sont produits dans des pépinières situées dans les bases des agents des Eaux et Forêts avant leur transfert dans les parcelles. La production des plants mobilise la main-d’œuvre locale ;
  • Les parcelles sont protégées contre la divagation des animaux par des clôtures métalliques mais également par l’installation de pare-feu contre les feux de brousse ;
  • Au total, 120 000 ha ont fait l’objet de gestion améliorée (Reboisement, mise en défens, ZAI, RNA, fixation de dunes, demi-lunes, etc.) et 13 250 km de pare-feu ont été installés
  • Les jardins polyvalents maraîchers forment le second pilier de l’intervention du projet au Ferlo. Entre 2010 et 2016, onze jardins sont créés ;
  • Les bassins de rétention figurent aussi en bonne place dans les priorités d’aménagement de la GMV ; mais du fait que les résultats sont plutôt mitigés, l’expérience s’est limitée à Labgar et elle n’a pas été reconduite dans les autres communes du tracé de la GMV ;
  • La plupart des personnes interviewées ne connaisse cependant la GMV qu’à travers les médias.
  • Les chances de succès de la GMV peuvent être liées à : (i) l’obtention d’un ancrage communautaire fort, seul base pour une durabilité des activités des populations et pour une réduction des coûts de réalisation (ii) la mise en œuvre d’une évaluation systématique des taux de réussite des plantations.

Possibilité de mise en œuvre de la PMR (gestion participative des parcours – modèle ILRI)

  • Selon les populations locales, le facteur de dégradation le plus important en ZSP est le manque d’eau lié surtout au déficit pluviométrique qui occasionne au niveau des herbacées une réduction de la production de semences avec à terme la disparition de certaines espèces et des mortalités au niveau des ligneux ;
  • L’effet des feux est considéré à travers le déficit de fourrage qu’ils occasionnent et la modification de la composition floristique de la strate herbacée ;
  • Les expériences en matière de gestion participative des parcours ont trait : (i) à la mise en place d’UP [plusieurs projets de développement (PAPEL, PASA, PRODAM, PADAER, PDESOC, PAFA, et AVSF) s’y sont attelés depuis le début des années 90] ; (ii) à l’établissement de POAS dans les zones agrosylvopastorales (communes au nord du pays) ; (iii) au contrôle de la charge animale ; (iv) à l’application de la gestion holistique des parcours en ZSP (vers 1996, au niveau d’Asré bani puis Lol lol.).
  • Les problèmes /défis liés à la GPP sont : i) l’autonomisation des communautés pastorales par rapport à la gestion de leur espace et des ressources qui n’est pas encore atteinte dans aucune UP ; ii) les compétences en techniques d’animation, de renforcement des capacités et de suivi évaluation des communautés qui font défaut ; iii) l’implication des collectivités locales qui n’est pas toujours effective ; iv) le renforcement de capacités des acteurs à la base qui n’est pas effectif ; v) le comité de veille regroupant l’ensemble des parties et est chargé de l’évaluation qui n’est pas encore mis en place ; vii) le règlement très souvent à l’amiable des conflits ou en cas de fraude ; viii) l’accent mis sur les infrastructures et non sur la bonne gouvernance ;
    • Les programmes/projets de GPP sont au nombre de vingt dont dix-huit clôturés ou en cours et deux en perspective ;
    • Parmi les solutions mises en œuvre pour la GPP, il y a : (i) la sensibilisation à travers les médias et les animateurs ; (ii) le balisage des axes de transhumance et l’aménagement de commodités (aire de repos par exemple) ; (iii) la mobilisation sociale accrue contre les feux de brousse ; (iv) le renforcement du rôle des radios communautaires pour la sensibilisation ; (v) l’information des populations ;
    • La mise en œuvre de la PMR dans les zones pastorales du Sénégal va permettre : (i) un accès aux ressources plus équitable ; (ii) un renforcement du dialogue entre différents acteurs ; (iii) une meilleure possibilité d’anticipation des populations locales ; (iv) une réduction du nombre de conflits.
    • Parmi les opportunités offertes par la mise en œuvre de la PMR, il est noté entre autres : (i) l’existence d’une forte expérience de gestion communautaire des parcours ; (ii) la compréhension des enjeux grâce à la mise en œuvre d’outils de gestion similaires (POAS et UP) dans la mise en œuvre de la PMR ; (iii) la présence de plus en plus importante d’organisations de communautés de bases (OCB) et d’organisations de producteurs (OP) dynamiques.
    • Parmi les défis liés à la mise en œuvre de la PRM, il y a : (i) la capacité des acteurs ; (ii) l’échelonnement des activités ; (iii) l’identification des partenaires susceptibles de soutenir la PMR ; (iv) l’évaluation des zones géographiques susceptibles d’accueillir la PRM
    • Les goulots d’étranglement sont liés à : (i) la dimension juridique des conventions locales qui reste à consolider ; (ii) la volonté des autorités politiques à décider à la place des gestionnaires choisis par les groupes d’usagers ; (iii) la persistance du réflexe de « retourner ce que l’on a prélevé » non acquis ; (iv) la pré éminence de la parole des notables ;
    • A travers une démarche collaborative, d’importants acquis ont été obtenus dans la compréhension des systèmes de production pastorale. Et au début des années 2000, le PPZS a pu construire au cours du temps une valeur ajoutée autour de la thématique du pastoralisme et avoir des acquis importants dans la connaissance des systèmes pastoraux ;
    • Concernant les compétences nécessaires pour la mise en œuvre de la PRM au niveau national, plusieurs structures s’activent dans le domaine du renforcement de capacités des organisations pastorales. Parmi celles-ci, figurent AVSF, des organisations de producteurs (RBM et APESS) et des cabinets de consultance [CVCS, SAHEL EPA (Environnement-Pastoralisme-Agriculture)] ;
    • Les travaux de Recherche Développement menées depuis plusieurs années notamment avec le PPZS, ont permis : i) de mettre au point des indicateurs de suivi des ressources, ii) et d’élaborer des outils et des connaissances sur l’étude et la gestion des socio -écosystèmes pastoraux. Il a par la suite accompagné les universités et autres institutions de recherche et d’enseignement pour l’élaboration de modules de formation sur les écosystèmes arides et semi-arides ;
    • Pour la planification des activités, le MEPA dispose d’experts (en Sciences vétérinaires, zootechnie, socio-économie, aménagement, etc.) susceptibles de prendre en charge toutes les préoccupations devant aboutir à l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi évaluation de projets et programmes. Ces équipes ont pu accompagner les projets antérieurs et en cours dans le domaine de la gestion des ressources pastorales de structures ;
    • Concernant les informations sur le climat et le changement climatique, l’ANACIM dispose à travers le pays d’un réseau de stations météorologiques et de pluviomètres. Une série de données journalières (pluies, humidité, température, vent, etc.) plus ou moins complètes sur plusieurs décennies peut être obtenue sur demande. Des données d’évolution du NDVI sont disponibles durant toute la saison des pluies et des feux de brousse durant toute l’année grâce aux travaux du Centre de Suivi Ecologique (CSE).
    • Le Suivi Evaluation (SE) des activités est fait par les experts nationaux qui ont acquis une expérience à travers les travaux de SE des projets antérieurs de GPP.
    • L’échelonnement des activités dans la mise en œuvre de la PMR peut être établi comme suit : (i) le recensement des acteurs qui s’activent dans la zone ; (ii) et l’information de tous les acteurs. Par la suite, les critères de choix (cohésion sociale, dynamisme organisationnel, proximité avec d’autres UP,.) ; sont validés par les populations, les autorités locales et les structures d’encadrement au cours des comités locaux de développement (CLD) organisés à cet effet ;
    • Les principaux partenaires susceptibles de soutenir la PMR sont : les OP (RBM, APESS), les ONG (AVSF), les communes, les ministères (MEPA, MEPN ; MInt, GMV), la coopération bilatérale (France, Allemagne (GIZ), etc.), la coopération multilatérale (BM, BAD, FIDA) et les institutions de recherche-développement et d’enseignement (ISRA, Universités)
    • Parmi les critères qui ont été retenus pour les zones susceptibles d’accueillir la PRM, il y a : (i) l’existence d’une plateforme d’institutions travaillant au niveau local sur les questions relatives à l’élevage ; (ii) Progression des UP en tâches d’huile ; (iii) des sites ayant fait l’objet d’investigations antérieures et de mise en place de plans de gestion participative des parcours ; (iv) des zones à haute intensité de conflits pour leur faire bénéficier des avantages de la gestion participative ; (v) des sites avec des données de recherches sur plusieurs années.

Possibilité de mise en œuvre de l’assurance bétail indicielle (IBLI) dans les zones pastorales du Sénégal

• Les projets et programmes ayant soutenu les prestations de services aux éleveurs dans les zones pastorales du Sénégal sont : le PAPEL ; le PRODAM ; la PROSE ; le BRACED ;
• L’assurance mortalité du bétail tout risque est celle qui la plus courante en ZSP. Pour sa mise en œuvre, la CNAAS collabore avec les services vétérinaires publics (SREL, SDEL, postes vétérinaires) à travers un protocole d’accord signé avec le ministère de tutelle MEPA (DIREL) et les vétérinaires privées, les institutions financières et les organisations d’éleveurs. Pour les contraintes liées à sa mise en œuvre, il y a : (i) la procédure de souscription lourde et coûteuse ; (ii) la mobilité du troupeau et des éleveurs ;
• Parmi les contraintes de mise en œuvre de l’IBLI, on peut noter : (i) l’aléa moral des éleveurs qui peuvent déclarer des sinistres sur des sujets non assurés ; ii) le risque de non-indemnisation d’un éleveur sinistré ; (iii) le faible taux de souscription ne permet pas de réaliser des économies d’échelle pour réduire les coûts ;
• Avec la mise en œuvre de l’IBLI dans les zones pastorales va permettre, l’éleveur pourra avec l’assurance indicielle bétail compenser ses pertes de revenus directement liés à la baisse de la productivité de la biomasse suite à un déficit hydrique. L’IBLI permettra également aux pasteurs de rester résilients face aux chocs climatiques tels que les déficits pluviométriques, la sécheresse, les feux de brousse ; les revenus compensés lui permettant de mieux alimenter et soigner ses animaux.
• Pour le fonctionnement d’un modèle d’assurance IBLI, une plateforme numérique peut être mise en place ; il regroupera les pasteurs, les prestataires de services financiers (crédit en élevage et assurance indicielle) et les prestataires de services vétérinaires. La plateforme va nécessiter une bonne infrastructure technologique des opérateurs de réseau mobile (ORM) et un maillage en différents points de services digitaux dans la zone pastorale ;
• Les opportunités offertes par la mise en œuvre de l’IBLI sont : (i) la LOASP avec ses articles 56 et 57 où l’Etat soutient les politiques relatives à la protection contre les calamités naturelles dans les zones agro-sylvo-pastorales ; la politique de subvention de l’assurance agricole par l’Etat à 50 %. ; l’existence de services techniques expérimentées pour constituer un consortium ; des institutions financières bien représentées en zone pastorale ; l’existence d’organisations d’éleveurs ; le soutien dans l’animation des UP ;.
• Concernant les défis, il y a ; (i) l’extension de la subvention sur l’assurance indicielle bétail (IBLI) ; (ii) la mise en place un consortium pour le pilotage de l’IBLI ; (iii) l’implication des éleveurs dans le processus. ;
• Les goulots d’étranglement se retrouvent dans les aspects culturels (la mort d’un animal étant considérée comme un acte salutaire pour la famille) ;
• Au regard du fait que l’IBLI est une nouveauté, il sera nécessaire de renforcer les capacités des différents acteurs dans le pilotage et/ou la mise en œuvre de l’IBLI :
• Les différentes étapes à suivre dans la mise en œuvre de l’IBLI sont : (i) Etape 1 : Définir l’indice ; (ii) Etape 2 : Rédiger et mettre en œuvre un projet pilote sur 3 ans pour tester l’indice commercial à petite échelle (3 ans) ; (iii) Etape 3 : Introduire l’indice commercial après la phase pilote à une plus grande échelle ;
• Parmi les partenaires pouvant soutenir la mise en œuvre d’IBLI au Sénégal, il y a : (i) au niveau national, les institutions gouvernementales (CNAAS, ANACIM, ISRA, MEPA, CSE, PPZS) ; les ONG (AVSF, PROSE) ; les OP (RBM, APESS) ; et le Privé : Banque agricole ; (ii) au niveau international : ILRI ; Inclusive Guarantee ;
• Le département de Linguère a été proposés par les acteurs rencontrés pour le démarrage de l’IBLI