Think tank sur les politiques publiques dans le secteur agricole et rural en Afrique de l’Ouest

Accueil / Que faisons-nous ? / Recherche / Objectifs de développement durable (ODD) / Projet de recherche sur les politiques d’assainissement en Afrique de (...) / Restitution de l’étude portant sur les opportunités d’investissement du secteur (...)

Restitution de l’étude portant sur les opportunités d’investissement du secteur privé dans l’assainissement au Burkina Faso

Publié le 28 juillet 2023

Le Think Tank IPAR a organisé, en collaboration avec le Groupe de Recherche et d’Analyse Appliquées pour le Développement (GRAAD), l’atelier de restitution de l’étude portant sur les opportunités d’investissement du secteur privé dans l’assainissement au Burkina Faso

Organisé le 28/07/2023, à Ouagadougou, l’atelier a réuni une trentaine de personne, avec la participation des représentants du Ministère de l’eau et de l’assainissement, notamment la Direction générale de l’assainissement, du Ministère de l’eau, des opérateurs privés, des ONGs, des collectivités locales, de la presse et des universitaires.

Cette étude est faite dans le cadre du projet WASPA, financé par la Fondation Bill et Melinda GATES et mis en œuvre par IPAR et ses partenaires Speak Up Africa et Niyel, qui s’efforcent d’encourager le leadership politique en faveur d’une gestion sûre de l’assainissement dans 5 pays francophones d’Afrique de l’Ouest (Bénin, Burkina Faso, Mali, Niger, Sénégal) à travers un plaidoyer soutenu par des données probantes provenant de la recherche.

L’objectif de l’étude est de produire des évidences sur les opportunités d’investissement privé dans le secteur de l’assainissement autonome au Burkina Faso, afin d’éclairer la décision publique et privée dans le sens du développement d’une offre de services d’assainissement accrue et de qualité. Pour atteindre cet objectif, les analyses se sont basées sur des données primaires et secondaires (quantitatives et qualitatives). Pour la collecte des données primaires, l’approche multiacteur a été privilégiée. L’enquête quantitative a couvert cinq (5) communes (Ouagadougou, Bobo Dioulasso, Koudougou, Ouahigouya et Fada N’Gourma) et a touché au total 1043 ménages, 50 entreprises de vidange mécanique, 61 de vidange manuelle et 38 utilisateurs finaux des BV.

De manière générale, la recherche relève un cadre politique général et un contexte national et international favorables à l’investissement privé dans le sous-secteur des boues de vidange (BV). Dans la quasi-totalité des politiques sectorielles analysées, notamment la Politique Sectorielle Environnement, Eau et Assainissement (PS-EEA, 2018-2027), le secteur privé ressort comme un acteur clé de la promotion de services d’assainissement de qualité.

L’étude révèle par ailleurs que le sous-secteur des BV reste un marché à prendre. Les besoins non satisfaits, les énormes besoins de financement du secteur, l’importance et l’accroissement continu de la demande du fait de l’accroissement de la population et du niveau de vie apparaissent comme de grandes fenêtres d’opportunités pour l’investissement privé dans le domaine. Les analyses de la chaîne de valeur ont révélé des segments de marché très faiblement occupés, voire totalement non occupés. Dans la plupart des villes secondaires, il n’existe pratiquement pas de service de vidange mécanique. Sur ce point, le diagnostic économico-financier de la filière met en lumière trois niveaux d’opportunités d’investissement intéressant : (i) promotion d’institutions spécialisées de formation pour répondre aux besoins de formation des acteurs, (ii) développement d’un système de Banking mieux adapté pour répondre à la contrainte de crédit actuel, (iii) investissement dans la gestion de certains déchets qui ne sont pas pris en compte par les services d’assainissement actuels. L’analyse économico-financière de la chaîne de valeur révèle quant à elle un niveau de rentabilité du sous-secteur de BV appréciable. En moyenne, un opérateur mécanique gagne 420 164 FCFA par mois, contre 87 244 FCFA pour un opérateur manuel. Enfin, c’est un secteur de fort potentiel de création d’emploi à même de soutenir les politiques du gouvernement en la matière.

Sur les plans politique et institutionnel, les principaux défis auxquels le sous-secteur fait face restent notamment sa faible prise en compte dans les projets et programmes qui privilégient en général le sous-secteur de l’eau et la faible application des textes. Sur le plan financier, la problématique d’accès à un crédit approprié demeure un obstacle important. De ce point, il ressort que seulement 5% des opérateurs ont eu accès aux sources de financement formel ou d’ONG/fondations et associations. Quelle que soit la source de financement, les montants obtenus restent faibles. En ce qui concerne les infrastructures, l’étude montre que les sites de dépotage aux bonnes normes demeurent insuffisants et n’existent que dans les grandes villes. En ce qui concerne les opérateurs mécaniques, l’étude a noté que les camions utilisés sont en général vétustes et consomment excessivement le carburant. Cela réduit les gains, et encourage le dépotage dans les lieux inappropriés. Pour le capital humain, les enquêtes montrent que les opérateurs ont un faible niveau d’instruction (81,08% sans aucun niveau d’instruction) et n’ont reçu aucune formation professionnelle en lien avec les BV. Enfin, un défi non moins important à relever est relatif aux mauvais comportements d’environ un tiers (30%) des ménages qui continuent de déverser la plupart de leurs déchets dans l’espace public au lieu de faire appel aux services d’assainissement en place.

Globalement, une analyse croisée de ces faits et constats suggère six (6) types d’interventions déclinées en onze (11) recommandations.

Meilleur positionnement du sous-secteur des boues de vidange dans la décision publique
Recommandation 1 : attirer l’attention des décideurs spécifiquement sur la question de la gestion des boues de vidange à travers la tenue de rencontres et d’ateliers de sensibilisation ciblés, notamment sur la question de la budgétisation.
Recommandation 2 : Vulgariser davantage les textes, spécifiquement ceux relatifs au sous-secteur des BV, notamment par leur traduction dans les langues nationales les plus couramment utilisées et des rencontres d’échanges directs avec les acteurs concernés.
Renforcement des capacités techniques et managériales des opérateurs privés
Recommandation 3 : Renforcer les capacités techniques des opérateurs privés pour leur permettre de développer tout leur potentiel et d’investir tous les segments porteurs du sous-secteur des BV. Cela peut se faire à travers des voyages d’étude et de démonstration ou des formations spécialisées selon le besoin.
Recommandation 4 : Renforcer les capacités managériales des opérateurs privés pour leur permettre de mieux gérer leur business et de mieux tirer profit de la clientèle actuelle et potentielle. La formation sur le management et le marketing est particulièrement recommandée.
Recommandation 5 : Développer l’esprit d’innovation des opérateurs privés grâce aux outils existants en la matière. L’esprit d’innovation permet d’élargir le champ des opportunités au-delà de ce qui est connu.
Accroissement de l’accès des opérateurs privés aux marchés publics
Recommandation 6 : Sensibiliser les opérateurs privés sur l’importance de la formalisation de leurs entreprises en termes d’affaires et les accompagner dans ce sens.
Promotion de la diversification des sous-secteurs d’investissement
Recommandation 7  : Les analyses de l’étude montrent que la plupart des opérateurs sont concentrés essentiellement dans les segments de la collecte et du transport. Pourtant, beaucoup d’autres segments sont porteurs, mais aussi incontournables pour une bonne gouvernance de la question. Il faut donc diversifier le sous-secteur et pour cette diversification, les grands domaines porteurs de positionnements les plus pertinents pour l’investissement privé sont les suivants : infrastructures, valorisation, renforcement des capacités, financement spécialisé, services à destination des ménages non encore couverts.
Desserrement de la contrainte de financement
Recommandation 8 : promouvoir la création de services spécialisés par des rencontres directes avec les institutions financières, notamment les banques et autres institutions financières de la place.
Recommandation 9 : accompagner les promoteurs privés à concevoir des plans d’affaires de hauts standards, et à monter des dossiers de crédits bancables.
Promotion de l’hygiène et de la sécurité au travail
Recommandation 10  : former les opérateurs privés sur les bonnes pratiques en matière d’hygiène et de sécurité de travail.
Recommandation 11 : sensibiliser les opérateurs privés sur l’importance du respect des mesures d’hygiène et de sécurité.